
Frédéric, victime d’un AVC: « Maintenant, je ne peux plus rien faire »

Victime d’un AVC en 2016, Frédéric en a gardé de graves séquelles. Pour cet ancien pâtissier au caractère très indépendant, le quotidien est devenu une prison. Il tient à témoigner de la difficulté majeure du parcours des personnes dites cérébrolésées.
Le 23 janvier 2016, Frédéric était en train de repeindre le mur de sa salle de bains lorsqu’il s’est rendu compte qu’il ne pouvait plus redescendre de son échelle. «Je ne savais pas du tout ce qu’il se passait, raconte-t-il. J’ai réussi à me traîner à quatre pattes sur le tapis au pied de mon lit et j’ai attendu pendant plusieurs heures le retour de mon épouse. Je me souviens de tout.» Victime d’un AVC (Accident Vasculaire Cérébral), Frédéric restera pendant près de quatre semaines en soins intensifs.
«Je savais que j’avais des problèmes cardiaques, mais jamais je n’aurais pensé que je ferais un AVC. Je me suis retrouvé accroché à une cinquantaine de tuyaux. Ce que je me suis dit sur le moment ? Zut..., résume-t-il laconiquement. Les médecins m’ont tout de suite dit : ‘Monsieur, ça va être très dur. D’abord très dur à accepter et ensuite très dur à vivre’.» Rapidement, des consultations avec une psychologue sont proposées à Frédéric, sans que cela lui ait été d’un grand secours. «Parler ne m’a pas du tout aidé. La réalité était malheureusement là. Je n’avais pas le choix.»
En maison de repos à 53 ans
Après une très longue revalidation, quitté par son épouse, Frédéric se retrouve dans une maison de repos. «À 53 ans…, s’indigne-t-il. Un véritable enfer ! Un endroit dirigé par un monsieur de 92 ans et où je ne me sentais pas du tout respecté. Mes affaires disparaissaient, mais on me disait qu’elles n’avaient jamais été là… J’avais l’impression qu’on jouait sur le fait que je perdais peut-être la mémoire à cause de mon AVC.»
J’ai retrouvé le pouvoir d’être chez moi.
Frédéric découvre alors qu’outre les limitations physiques majeures qui sont désormais les siennes, il est aussi exposé, en tant que personne en situation de handicap, à de nombreuses discriminations et maltraitances. Mais grâce à l’asbl Le Ressort, qui accompagne les personnes cérébrolésées et les soutient dans la reconstruction de leur projet de vie, Frédéric peut à nouveau habiter seul malgré son fauteuil roulant et ses difficultés motrices. Il occupe désormais un appartement situé au rez-de-chaussée, à Gembloux. «J’ai retrouvé le pouvoir d’être chez moi», confie-t-il, sans rien embellir d’un quotidien qu’il perçoit malgré tout comme une prison.
Des journées très longues
«J’étais pâtissier, et j’ai gardé l’habitude de me réveiller très tôt, vers quatre heures et demie, cinq heures… J’attends l’infirmière pour mes soins. Puis, selon les jours, je reçois la visite de l’aide-ménagère, de l’aide familiale, et mes enfants passent parfois me voir. Mais les journées sont très longues, l’ennui est très fort, poursuit Frédéric qui regrette amèrement sa vie d’autrefois. J’étais un grand bricoleur. Et avec mon caractère très indépendant, j’étais aussi toujours à droite à gauche, j’étais ‘Mister Vadrouille’. Maintenant je ne peux plus rien faire.»
Seules les activités organisées par Le Ressort rompent un peu la monotonie et l’isolement. «Je participe à tout : activités jeux de société, chant, improvisation… » Au Ressort, Frédéric côtoie des personnes qui ont traversé les mêmes épreuves et le même choc existentiel. «Ce que je peux dire, c’est que c’est dur pour tout le monde.» Lorsqu’il était en revalidation, Frédéric a noué une amitié avec Marie-Paule Coppée, également victime d’un AVC et qui en a tiré un récit (Putain d’chemin, éditions Edilivre, 2021). Lui aussi tient maintenant à témoigner, «parce que les gens ne peuvent pas s’imaginer ce que c’est... Les difficultés dans lesquelles on est, ça ne passe pas. On doit vivre avec…».
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