Testament: comment le rédiger, combien ça coûte et peut-on le modifier?
Le testament reste l’outil par excellence pour déterminer ce qu’il adviendra de votre héritage, dans les limites de la loi. Mais est-on obligé de passer par un notaire ? Combien cela coûte-t-il ? Et peut-on le modifier plus tard ? On fait le point avec un expert.
Au cours du premier semestre de cette année, 40.873 testaments ont été rédigés dans notre pays. C’est un peu moins que l’an dernier, mais toujours nettement plus qu’en 2020, lorsque seuls 29.139 Belges avaient entrepris cette démarche. Si le testament est plus populaire ces dernières années, c’est en grande partie lié à la période du coronavirus. Beaucoup de Belges ont alors été confrontés de près à la maladie, voire au décès d’un proche, ce qui les a incités à mieux organiser leur succession. Par ailleurs, de plus en plus de personnes réalisent qu’il est judicieux de prendre certaines dispositions même à un âge moins avancé. Qui gérera l’héritage si vous avez encore de jeunes enfants ? Qui souhaiteriez-vous comme tuteur si vos enfants sont mineurs ? Dans une société où les situations familiales sont souvent plus complexes qu’autrefois, ce n’est certainement pas une démarche superflue.
Quelque 25% des testaments enregistrés au premier semestre 2025 l’ont été en Wallonie, contre près de 70% en Flandre et 5% dans la Région de Bruxelles-Capitale. L’âge moyen des testateurs est de 66 ans en Wallonie, 62 ans en Flandre et 69 ans à Bruxelles.
Pourquoi établir un testament?
«Le testament reste l’outil par excellence pour garder, dans le cadre fixé par la loi, le contrôle sur ce qu’il adviendra de votre héritage », explique Carol Bohyn, notaire et porte-parole du site officiel des notaires de Belgique (notaris.be, l’équivalent flamand de notaire.be) sur lequel vous pouvez retrouver des informations pratiques sur des aspects juridiques tels que les donations et les successions. «Votre conjoint et vos enfants ont droit, dans tous les cas, à une certaine part de votre succession. Ensuite, vous pouvez transmettre le solde de votre héritage à qui vous voulez. Si vous n’avez pas rédigé de testament, votre succession sera automatiquement répartie selon les règles légales en vigueur.»
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Un exemple concret: selon le droit successoral, il est impossible de déshériter complètement son enfant. Celui-ci a toujours droit à au moins la moitié de votre patrimoine, ce qu’on appelle la part réservataire. Pour l’autre moitié – la quotité disponible – vous êtes libre de la léguer à qui vous le souhaitez. Un testament permet donc de privilégier certains enfants, ou de prévoir qu’une partie de vos biens ira à une autre personne ou à une organisation caritative.
De nombreux couples non mariés recourent également au testament pour se protéger mutuellement, car la loi ne leur accorde qu’un droit très limité (voire aucun droit) sur la succession de leur partenaire. Les partenaires sans enfants, tout comme les célibataires, ont eux aussi intérêt à rédiger un testament. Cela leur permet de désigner un héritier particulier ou de soutenir une œuvre qui leur tient à cœur. Enfin, le testament est souvent l’outil de planification idéal pour les familles recomposées, car il permet de léguer quelque chose à ses beaux-enfants, ce que la loi ne prévoit pas automatiquement.
Faut-il obligatoirement passer par un notaire?
«Non, ce n’est pas obligatoire mais le testament authentique reste le choix le plus sûr. Établi par un notaire, il prend la forme d’un véritable acte notarié. Le principal avantage est qu’il ne peut pas être contesté par les héritiers après votre décès et qu’il bénéficie d’une force probante particulière. Ce qui n’est pas le cas d’un testament olographe que vous rédigez de votre main. Vous pouvez décider de le faire enregistrer auprès d’un notaire afin d’éviter le risque de perte – qui aurait pour conséquence que vos dernières volontés ne pourraient pas être respectées. En outre, les testaments olographes donnent fréquemment lieu à des discussions entre héritiers : certains peuvent contester l’authenticité de l’écriture, mettre en doute votre capacité juridique au moment de la rédaction, ou encore prétendre que vous avez subi des influences extérieures.»
Rédiger son testament soi-même comporte le risque qu’un héritier qui se sent lésé en conteste la validité.
Une mise en garde. «Attention si vous rédigez vous-même votre testament, prévient Carol Bohyn. Les héritiers qui s’estiment lésés peuvent en contester la validité ou en attaquer le contenu. Cela débouche souvent sur de longues procédures. L’autre avantage du testament authentique est que le notaire maîtrise toutes les règles juridiques et successorales. Il peut intervenir en cas d’erreurs légales et vous conseiller sur les conséquences familiales et fiscales des dispositions que vous prenez dans votre testament.»
Combien coûte un testament?
«Pour la rédaction d’un testament par un notaire, le prix de base est de l’ordre de 600 € en moyenne, taxes et frais d’enregistrement compris. Le montant exact dépend surtout de la complexité des dispositions prévues. Un testament complexe peut coûter plus de 1000 €. Il est donc conseillé de toujours se renseigner au préalable auprès de l’étude notariale. Généralement, le notaire propose un premier entretien gratuit, même si cela n’est pas une obligation légale.
En principe, un seul rendez-vous suffit pour rédiger un testament. Mais certains préfèrent d’abord avoir un ou plusieurs entretiens pour pousser la réflexion plus loin. Le testament authentique est rédigé par le notaire, lu à voix haute, puis signé par le testateur. Il peut ensuite être facilement retrouvé grâce à son enregistrement dans le Registre central des testaments (CRT), géré par Fednot, la Fédération du notariat. Le coût de l’inscription d’un testament au CRT s’élève à 25 €, TVA comprise.
Bon à savoir. «Le contenu des testaments n’est pas enregistré dans ce registre, seulement les informations concernant l’identité de la personne, la date de rédaction et le notaire concerné. Ainsi, après un décès, les héritiers peuvent facilement savoir si un testament existe et à quel notaire ils doivent s’adresser. Le CRT contient des données tant sur les testaments authentiques que sur les testaments olographes qui ont été présentés à un notaire pour enregistrement.»
Peut-on modifier son testament ultérieurement?
«Tout à fait. Et il est même conseillé de se pencher sur le contenu de son testament à chaque grande étape de la vie. Un testament reflète en effet vos volontés au moment de sa rédaction. Peut-être l’avez-vous rédigé à 30 ans alors que vous n’aviez pas encore d’enfants. Vos parents étaient encore en vie, mais trente ans plus tard, la situation a changé. Peut-être êtes-vous divorcé, avez-vous des petits-enfants, ou même un nouveau partenaire. Si votre vie a évolué, il est logique de rédiger un nouveau testament pour que vos dernières volontés correspondent à votre situation actuelle.»
Pour rappel. «Dans la pratique, nous constatons que de plus en plus de Belges révisent leur testament. Autrefois, les gens estimaient qu’avec un testament, tout était réglé jusqu’à la fin de leur vie. Mais c’est une illusion et cela peut même engendrer des problèmes s’il n’est plus adapté à votre situation. Tant que vous ne le modifiez pas ou ne le révoquez pas, le testament établi reste valable.»
Quelle est la différence entre un testament et un pacte successoral?
«De plus en plus de Belges choisissent de conclure un pacte successoral. Si ce dispositif concerne lui aussi la succession, il diffère fondamentalement du testament. Un testament est un document unilatéral, rédigé uniquement par le testateur, sans accord des héritiers. À l’inverse, un pacte successoral est un document bilatéral, une véritable convention. Dans ce document officiel, le futur testateur et les héritiers s’accordent sur le rapport d’une ouplusieurs donation(s) dans la succession. Cela permet d’éviter des discussions lors de l’ouverture de la succession.»
Un exemple concret. Un enfant a suivi des études coûteuses aux frais de ses parents, tandis que l’autre a reçu en contrepartie une donation en espèces.Juridiquement, les frais d’études ne sont pas considérés comme une donation, contrairement à l’argent liquide dont il sera tenu compte pour le partage de la succession. Un pacte successoral permet de rétablir l’équilibre, toutes les parties convenant que les études et la donation se compensent mutuellement.
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