
Délit de fuite après un accident: panique ou stratégie calculée?
Comment peut-on prendre la fuite après avoir provoqué un accident, alors qu’une vie est peut-être en danger? La question en amène une autre: et nous, que ferions-nous dans un cas pareil?
Plusieurs enquêtes se sont penchées sur les délit de fuite afin de mieux comprendre ce qui motive ce genre de comportement. Il en ressort que les motivations des coupables sont très variées. «On estime qu’une fois sur cinq, celui qui se rend coupable d’un délit de fuite le fait sciemment, pour échapper à ses responsabilités, indique Frederick Vinckenbosch, psychologue de la circulation (Institut VIAS). Dans ce cas, le délit de fuite va souvent de pair avec des circonstances aggravantes, comme rouler sous influence (alcool, drogue), sans permis ou sans assurance. La personne calcule rapidement la balance coût-bénéfice et en conclut qu’elle a plus à gagner en fuyant. Parfois, elle se présente volontairement à la police plus tard afin qu’on ne puisse plus lui faire de test d’alcoolémie ou anti-drogue. Et, souvent, les coupables s’en tirent de cette manière.»
La choix rationnel de prendre la fuite dépend de nombreux critères, notamment de nos prédispositions génétiques. L’alcool et les médicaments peuvent modifier la réponse à un stimulus. «Comme différents facteurs entrent en ligne de compte, il est souvent difficile de déterminer après coup si le délit de fuite était un choix conscient ou pas. »
Ceux qui paniquent…
Un nombre non négligeable de personnes fuient parce qu’elles paniquent. «S’il est normal de ressentir un petit moment de panique et d’avoir peur, certains peuvent ne plus parvenir à penser clairement et le réflexe primaire de combat-fuite prend le dessus. Il faut entre 30 et 90 minutes minimum pour que le pic de cortisol et d’adrénaline (deux hormones du stress) retombent. Mais le stress durable, le sentiment de culpabilité et/ou la peur de se faire prendre, provoquent, eux, un pic beaucoup plus long, qui se poursuit même après la crise de panique aiguë.
Les délits de fuite se produisent plus souvent de nuit, lorsque plus de gens roulent sous influence et risquent moins de se faire prendre.
Certaines personnes sont parfois si intoxiquées (alcool ou drogue) qu’elles ne sont plus en état de penser, ni de se rendre compte de ce qu’elles ont fait. D’autres s’arrêtent brièvement, avant de fuir parce qu’elles se sentent intimidées par les passants. Enfin, il y a les fuyards qui minimisent la gravité de l’accident et ne veulent pas admettre qu’ils ont fui sciemment. »
Le jour ou la nuit ?
Les délits de fuite se produisent plus souvent de nuit, lorsque plus de gens roulent sous influence et que le risque de se faire prendre est moindre. En journée, alors qu’il y a plus de témoins potentiels, les conducteurs sont plus susceptibles de faire le bon choix. En outre, le choc d’un trajet en voiture sans danger se transformant soudainement en une situation d’urgence aiguë peut également déclencher un réflexe de fuite.
Sommes-nous tous susceptibles de fuir ?
Si un fuyard potentiel se cache en chacun de nous, tout le monde ne se soustrait pas à ses responsabilités. «La plupart d’entre nous ignorent comment ils réagiraient après ce genre de choc. En effet, nos réflexes vitaux nous poussent précisément à fuir. Mais nous ne sommes pas tous égaux face à ce réflexe primaire. Les conducteurs de type nerveux, qui surréagissent facilement, seront tentés de fuir. Les plus résistants au stress gardent davantage leurs moyens et réagissent de manière plus rationnelle. Le type d’accident joue également un rôle. En cas de choc frontal violent, le choc traumatique et le risque de panique seront plus grands.»
Se préparer mentalement
Comme nous nous trouvons rarement dans de telles situations, notre cerveau n’y est pas préparé. «On peut s’entraîner mentalement en se demandant ce qu’on ferait en pareil cas. Imaginez un déroulé étape par étape: 1 je m’arrête; 2, j’appelle les secours; 3, je reste près de la victime; 4, je m’efforce de respirer calmement. C’est un exercice mental à répéter de temps à autre afin d’être mieux préparé en cas d’urgence.» Certains experts de la circulation suggèrent que les cours d’auto-école intègrent une formation en réalité virtuelle pour apprendre aux conducteurs à poser les bons choix.
Inge V.: “Je me répétais qu’il ne s’était rien passé”
«Il y a deux ans, alors que je manœuvrais sur un parking d’une entreprise, j’ai embouti un autre véhicule. Au lieu de sortir pour voir quels dégâts j’avais provoqués, j’ai continué à rouler comme si de rien n’était et je me suis garée à l’autre bout du parking. J’ai du mal à me l’expliquer, c’est comme si mon cerveau essayait de me convaincre qu’il ne s’était rien passé… Heureusement, cela n’a pas duré. Je me suis fait violence et suis allée constater les dégâts. J’ai pris note du numéro de plaque et j’ai demandé, à la réception, qu’on appelle le propriétaire de la voiture. Même si je n’approuve pas, depuis lors je comprends qu’on puisse avoir pour premier réflexe de fuir le lieu de l’accident. Dans mon cas, il ne s’agissait que de dégâts matériels, mais quid lorsqu’on renverse quelqu’un?! »
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