Don bancaire: attention à ces idées reçues
Le don bancaire est une forme de donation très prisée. Mais dans la pratique, elle n’est pas toujours utilisée conformément aux règles fiscales, et de nombreuses questions et idées reçues persistent.
Le don bancaire est la forme de donation sans notaire la plus populaire. Il consiste à transférer des avoirs bancaires ou des titres du compte (ou compte-titres) du donateur vers celui du bénéficiaire. En soi, le virement ne permet pas de dire qu’il s’agit d’une donation, car cela pourrait tout aussi bien être un prêt ou un remboursement. Il est ainsi conseillé de ne pas mentionner «don» ou «donation» dans la communication du virement.
Preuve du don bancaire
Il est vivement conseillé de conserver une preuve de ce don, tant vis-à-vis de l’administration fiscale que des autres héritiers. Vous évitez ainsi d’éventuels futurs litiges avec le fisc. En outre, cette preuve est également très utile si certaines conditions sont liées au don bancaire. Elle facilite aussi la compréhension de l’opération pour les autres héritiers, en clarifiant qu’il s’agit bien d’un don et non, par exemple, d’un prêt sans intérêts destiné à financer la construction d’une maison.
La preuve d’un don bancaire prenait autrefois généralement la forme d’un échange de courriers recommandés. Le donateur envoyait d’abord une lettre recommandée annonçant son intention de donner, puis, après le don, le bénéficiaire lui adressait un courrier de remerciement par recommandé. Aujourd’hui, on recourt davantage à un document probant signé par le donateur et le bénéficiaire (également appelé pacte adjoint). Ce document est rédigé après le don, au passé, car il ne peut pas lui-même signifier la donation.
Avec un e-mail d’intention ?
Dans environ 75% des cas, des conditions sont attachées au don bancaire. On pense notamment à la clause de retour, qui permet au donateur de récupérer la donation en cas de décès prématuré du bénéficiaire. Autres conditions fréquentes : l’interdiction d’apporter le don dans une communauté matrimoniale, une charge de rente annuelle de 3%, le fait que le don soit effectué hors part successorale ou au contraire, en avancement d’hoirie, etc.
Si des conditions sont reprises dans le pacte adjoint (document probant) d’un don bancaire, il est de plus en plus conseillé, dans la doctrine juridique, d’envoyer une lettre d’intention. Cette missive, émanant du donateur et adressée au bénéficiaire, précise l’intention de donner ainsi que les éventuelles conditions et modalités de la donation. Elle est rédigée et envoyée avant le don, afin de montrer que les conditions ont été convenues à l’avance et non après coup.
Dans la pratique, pour des raisons de commodité, il est désormais fréquent que le donateur envoie un e-mail d’intention préalablement à la donation. Cet e-mail peut également être envoyé par le banquier ou le comptable. L’important est d’y mentionner clairement l’intention de réaliser un don bancaire ainsi que les conditions qui y sont associées. Par exemple : «Bonjour Pierre, je prévois de te donner X euros hors part successorale. Tu ne devras donc pas le rapporter plus tard (cela ne sera pas décompté lors du partage de la succession). Es-tu d’accord ? Papa».
Pour ceux qui recourent à un échange de courriers recommandés comme preuve d’un don bancaire (un avant et un après), il n’est pas nécessaire d’envoyer un e-mail préalable, mais les conditions doivent être indiquées dans le premier courrier annonçant la donation.
Par courrier recommandé ?
Contrairement à une donation notariale, un don bancaire ne nécessite pas de date fixe : une date semi-fixe suffit. Elle peut être attestée, par exemple, par la date d’envoi des deux courriers recommandés dans la méthode classique ou par l’envoi du pacte adjoint plié en quatre par courrier recommandé. L’envoi par courrier recommandé n’est toutefois pas indispensable. Les extraits de compte, conservés par la banque pendant dix ans, permettent également de prouver la date du don. Pour un don de titres, les détails du transfert sont également repris sur les documents bancaires.
La meilleure preuve
Pour un don bancaire, un échange de courriers recommandés classiques ou un document probant (pacte adjoint) est tout à fait suffisant comme preuve. Dans la pratique, le pacte adjoint est de plus en plus privilégié, pour sa simplicité, mais surtout parce qu’il permet de prouver la date avec précision grâce à l’impression des extraits bancaires reprenant le virement.
Par courrier recommandé et ordinaire ?
Lorsque vous avez recours à l’échange de courriers recommandés, il est parfois conseillé d’envoyer les lettres à la fois en recommandé et par courrier ordinaire, en indiquant sur chaque lettre «courrier recommandé et ordinaire». Il va de soi que, d’un point de vue juridique, il n’est absolument pas nécessaire de procéder ainsi. Cependant, en pratique, cela peut s’avérer utile dans certaines situations.
Signature numérique ou manuscrite ?
Le document probant d’un don bancaire peut être rédigé et signé de manière numérique par le donateur et le(s) bénéficiaire(s). Cette option est particulièrement pratique lorsque des enfants résident à l’étranger.
Enregistrement = fin de la période suspecte ?
Après un don bancaire, il est tout à fait possible de faire enregistrer la preuve du don. Le cas échéant, vous devez payer des droits de donation sur la valeur du don. L’enregistrement reste facultatif. Si le don n’est pas enregistré et n’est donc pas imposé, le donateur doit rester en vie pendant une certaine période pour éviter que le don ne soit soumis aux droits de succession. Cette période dite suspecte est de cinq ans en Wallonie comme en Flandre. À Bruxelles, elle est encore de trois ans jusque fin 2025, mais passera à cinq pour les dons effectués à partir de 2026. Si le donateur est gravement malade et risque de ne pas survivre durant cette période, il est possible de procéder rapidement à l’enregistrement du document de preuve de manière numérique via la plateforme MyMinfin. Les documents peuvent y être envoyés à tout moment, mais l’enregistrement n’est effectif que les jours ouvrables, entre 8h et 12h. Par exemple, si tout est envoyé correctement un vendredi à 12h30, l’enregistrement ne sera effectif que le lundi matin à 8h. Bien que l’enregistrement numérique soit devenu la norme depuis le 10 mars 2025, il est toujours possible pour un particulier de procéder à un enregistrement en envoyant les documents nécessaires par voie postale ou en se rendant dans un bureau de la Sécurité juridique (sur rendez-vous).
À partir de quand commence cette période dite suspecte ?
Beaucoup pensent que cette période commence à courir à partir de la date figurant sur le document probant ou du cachet postal du courrier recommandé, mais ce n’est pas le cas. La période suspecte commence réellement au moment où le don bancaire est effectif, c’est-à-dire lorsque les avoirs bancaires ou les titres sont crédités sur le compte du bénéficiaire. Par exemple, si des parents effectuent un virement à leur fille le vendredi 31 octobre et que les fonds arrivent sur son compte le lundi 3 novembre, cette période commence à courir à partir du 3 novembre.
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