© frank bahnmüller

Vivre avec la SLA: ‘Il faut avoir en permanence deux coups d’avance’

«Aussi pénible et violente soit-elle, il est possible de vivre avec la SLA, la maladie de Charcot. On a pas d’autre choix que d’accepter sa nouvelle normalité», confie Erwin Van Berckelaer, 62 ans.

«Je suis lassé des compliments sur la façon dont moi et mon entourage gérons cette maladie, parce qu’en fait, cette vie ne me demande plus aucun effort.» Erwin juge important de parler de sa maladie et d’y sensibiliser le grand public. Il espère que sa voix sera entendue même si elle ne porte plus autant qu’à l’époque où il était entraîneur de football et que, du bord du terrain, il encourageait ses jeunes joueurs à se ruer à l’assaut du but adverse. «Comme mes muscles respiratoires sont touchés, ma voix porte beaucoup moins. J’ai besoin d’une assistance respiratoire pour faire le plein d’oxygène entre mes mots mais, à cela aussi, je me suis adapté.»

Sa vie bien remplie a pris un tournant inattendu il y a trois ans, lorsque les premiers symptômes se sont manifestés. «Mes muscles ont commencé à sérieusement s’affaiblir, j’avais du mal à respirer, je perdais du poids et je ne me suis pas remis d’une opération de la hanche alors que j’étais un grand sportif. Il a fallu plus d’un an et demi d’examens et de tests pour qu’on arrive à poser le bon diagnostic. Malgré le choc, j’ai éprouvé une sorte de soulagement: je savais enfin ce qui m’arrivait.»

Une évolution rapide

«Les premières semaines c’était la panique car nous n’avions aucune idée de ce qui nous attendait. La rencontre au centre neuromusculaire avec d’autres malades à un stade plus avancé a été très confrontante. La SLA évolue de manière imprévisible et, dans mon cas, la détérioration a été très rapide. Au moment du diagnostic, je pouvais encore presque tout faire, même si c’était au ralenti. Mais à partir de ce moment-là, je suis allé de renoncement en renoncement. Ça a d’abord été la voiture, ensuite le vélo, puis l’écriture et enfin la marche. Ma vie quotidienne changeait à une telle allure que ma femme Annemie et moi devions constamment être dans l’anticipation pour ne pas être pris de court. L’une des rares certitudes de la SLA est que, tôt ou tard, la maladie se stabilise. Dans mon cas, cette stabilisation est arrivée assez tardivement, à un moment où je ne pouvais déjà plus me déplacer qu’en fauteuil roulant électrique. Aujourd’hui, je suis presque complètement paralysé. Je peux encore tout ressentir, mais je ne peux plus rien bouger, sauf la tête. J’ai la chance de pouvoir encore parler, manger et déglutir. Je n’ai presque pas de douleurs si ce n’est, de temps en temps, des crampes dues à une position assise trop longue ou des démangeaisons. Avec un peu de patience, ces désagréments finissent toujours par disparaître. Et fort heureusement, j’ai conservé intacts mon sens de l’humour et mes expressions faciales.»

Ne rien remettre à plus tard

«Ma vie dépend complètement d’aides mécaniques, comme mon respirateur dont j’ai besoin 24H/24. S’il tombe en panne et que personne n’est à mes côtés, je suis perdu. C’est pourquoi nous avons mis en place un réseau bien huilé de bénévoles qui me tiennent compagnie quand Annemie est absente.»

Erwin et Annemie avaient des perspectives et des projets très différents avant que la maladie ne les frappe. «Nous étions proches de la pension et nos enfants – tous sauf un – avaient déjà quitté le nid. Nos grands projets pour la retraite se sont envolés. Au lieu de cela, Annemie a quitté son emploi pour devenir mon assistante personnelle et nous essayons de réaliser ensemble le plus de rêves possible. Nous sommes bien conscients qu’il ne faut rien remettre à plus tard.»

PROFITER DES PETITS BONHEURS

«Ces trois dernières années m’ont permis de vivre des expériences que je n’aurais jamais vécues sans cette maladie. Comme l’amour et l’amitié inconditionnels de ma famille et de mes amis et le fait de profiter de petits bonheurs. Même si la SLA est une maladie bien connue, je me heurte encore souvent à des incompréhensions. C’est ainsi qu’il arrive que des gens se tournent vers ma femme plutôt que vers moi parce qu’ils pensent que je ne les comprends plus. Mais la SLA affecte les muscles, pas l’esprit! Si j’accepte ma nouvelle normalité, c’est aussi grâce aux personnes qui m’entourent.»

Infos: www.als.be/fr

C’est quoi la SLA?

La sclérose latérale amyotrophique est une maladie neuromusculaire progressive. Les cellules nerveuses motrices qui transmettent les stimuli du cerveau aux muscles se détériorent et meurent: les muscles perdent progressivement leur force et leur fonction. À l’exception de ceux du système autonome, tous les groupes musculaires sont touchés. À l’heure actuelle, il n’existe aucun traitement. Un seul médicament est disponible en Europe mais son efficacité est limitée. Toutefois, plusieurs thérapies prometteuses sont en cours d’élaboration...

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