Famille recomposée : les grands-parents et leurs petits-enfants par alliance.
Mon nouveau compagnon (ma nouvelle compagne), ses petits-enfants et moi: mode d’emploi. Voici comment trouver votre place.
J’ai été très touchée par le fait que, en parlant de moi, la fille de mon mari ait dit « Mamie » dès que son premier fils est né, témoigne Catherine, 64 ans. Ses deux enfants ont donc trois grands-mères: les mères de leurs parents et moi. Et en effet, je me comporte comme une mamie: je n’oublie jamais leurs anniversaires, j’achète des cadeaux et je les aime. » Il est vrai que la langue française n’a pas de noms pour évoquer ces grands-parents par alliance, ces « beaux-grands-parents », ce qui traduit bien le flou autour de leur statut.
À chacun de « bricoler » comme il l’entend sa définition – mari de la grand-mère, grand-père par procuration. Souvent, comme les enfants, les petits-enfants l’appellent par son prénom. Mais l’usage des affectueux « Papi » et « Mamie » rend compte d’une vraie place. Ce terme chaleureux peut parfois être compliqué à manier, comme l’a constaté Viviane, 68 ans, lorsqu’un des petits-enfants de Jean-Jacques, son compagnon depuis cinq ans, l’a appelée « Mamie ». « Cela ne me gênait pas, je trouve que c’est à l’enfant de choisir. Mais quand nous nous sommes revus à une grande réunion de famille, le petit m’appelait à nouveau par mon prénom de façon très marquée, comme s’il avait été briefé par ses parents. Est-ce qu’ils ne voulaient pas qu’il le répète devant ses autres grands-parents? Ou vis-à-vis de mes petits-enfants qui étaient là aussi? Je n’ai pas osé demander et je ne l’ai pas su. »
• Une relation à la carte
Dans les familles recomposées, une des questions phares tourne généralement autour des enfants: accepteront-ils le nouveau conjoint ? Avec les petits-enfants, la relation est souvent bien plus détendue parce que moins lestée de contraintes. « Ce qui rend la situation beaucoup plus simple qu’avec les enfants, c’est que les moments sont choisis, vécus dans le plaisir et la joie, à la carte, explique Serge Hefez, psychothérapeute.
Si une grand-mère prend en charge quasiment à plein-temps ses petits-enfants et donc occupe une position quasi maternelle, le conjoint peut se sentir exclu. Mais le plus souvent, sentir l’autre épanoui au contact de ses petits-enfants est vécu positivement. » Avec les petits-enfants, qu’ils soient les nôtres ou les siens, nous partageons des loisirs, des week- ends ou des vacances loin des contingences quotidiennes.
• Trop jeune pour être grand-mère!
Il reste que pour faire le plongeon dans la grand-parentalité, il faut déjà avoir un peu avancé dans la vie. Or, il n’est pas rare qu’un homme épouse une femme d’une quinzaine d’années de moins. Une fois grand-père, sa compagne peut ainsi avoir des difficultés à s’identifier au rôle de grand-mère.
C’est le cas de Sylvie qui n’avait que 41 ans et ses enfants 11 et 14 ans lorsque son nouveau mari est devenu grand-père. « Suivre leur adolescence m’intéressait plus que de m’occuper d’un bébé, se souvient-elle. Maintenant, à 56 ans, j’en serais ravie. » Nathalie, 52 ans aujourd’hui, avait 36 ans quand son époux a vu naître son premier petit-enfant. « Comme je n’ai eu qu’un fils et que j’aurais voulu avoir d’autres enfants, j’attendais beaucoup de ces naissances. Mais je me sentais et je me sens encore trop jeune pour être mamie. Je travaille, j’ai peu de temps pour m’occuper des plus jeunes petites-filles de mon mari, même si je les adore et que j’essaie de prendre des congés quand elles viennent passer quelques jours à la maison. »
• Comme nos propres petits-enfants...
Même si les femmes reconnaissent davantage une préférence pour la « chair de leur chair », beaucoup de beaux-grands-parents affichent le même bonheur à s’occuper des petits-enfants de leur conjoint, idéalement dans un lien direct sans les parents. « Viviane a ses petits-enfants et moi les miens, explique Jean-Jacques, mais j’agis avec tous de la même façon: nous jouons, dessinons, nous nous promenons. Je ne fais pas de traitements différents. » À Noël et aux anniversaires, les cadeaux sont offerts au nom du couple par Viviane et Jean-Jacques, comme par Nicole et Georges. Ensemble depuis 1999, ces derniers ont vu naître et grandir leurs petits-enfants respectifs, nés de ls qui s’entendent très bien entre eux. Nicole et Georges ont acheté une grande maison, fait construire une piscine et aménager une salle de jeux sous les combles pour prendre chaque été tous ensemble leurs sept petits-enfants: « C’est comme si tous étaient mes petits-enfants, se réjouit Nicole. Cette maison, c’était une façon de nous les approprier un peu. Ils y vivent heureux tous les sept. » « Les avoir depuis toujours entre quinze jours et un mois l’été, hors de la présence de leurs parents, a contribué à tisser encore plus de liens »,renchérit Georges.
• Respecter les beaux-enfants
Si harmonieuse que soit la relation avec les petits-enfants de son conjoint, les pincettes sont souvent de rigueur avec leurs parents. « Cela rejoint les précautions de tous les grands-parents d’aujourd’hui avec la génération d’en dessous qui demande à ses parents beaucoup d’investissement et de présence, mais ne veut pas se sentir supplantée, explique Serge Hefez.
Avec de longues listes de recommandations laissées par leurs enfants, des grands-parents sont terrorisés par l’idée de mal faire et pour les « pièces rapportées », c’est encore plus compliqué. » Catherine se montre très vigilante vis-à-vis de sa belle-fille: « La naissance de ses deux fils nous a rapprochées. Avec eux, je suis dans les câlins, les bisous, la douceur. Je ne me permets pas de remarques, de conseils qui pourraient être mal compris et pourraient abîmer cette relation restaurée. » Comme son conjoint, Nathalie tait certaines réflexions: « Le fils de mon mari a épousé une Japonaise qui reprend les usages de son pays où l’enfant dort avec sa mère jusqu’à l’âge de 2 ou 3 ans. Nous ne donnons pas notre avis et nous essayons de ne pas juger. »
• Ménager les grands-parents biologiques
Présents, lointains ou décédés, les « vrais » grands-parents peuvent jouer un rôle dans le lien entre petits-enfants et beaux-grands-parents. Ces derniers veillent en général à ne froisser aucune susceptibilité, à ne susciter aucune rivalité. C’est la préoccupation de Viviane et Jean-Jacques, veufs tous les deux. « Je ne me permets pas les mêmes élans qu’avec mes petits-enfants parce que je ne voudrais pas que leurs parents pensent que je veux prendre la place de leur mère qui est partie », constate Viviane, tandis que Jean-Jacques veille à ne pas être appelé « Papi » par les petits-enfants de sa compagne pour la même raison, vis-à-vis du grand-père disparu.
Mais les liens peuvent aussi être simples et naturels autour de ces petits-enfants choyés par tous. Georges compte parmi ses amis un des grands-pères de ses beaux-petits-enfants. Catherine s’est rapprochée de l’ex-femme de son mari à la naissance de leur premier petit- ls parce qu’elle a senti que je soutenais sa fille. L’arrivée de ces enfants a rendu les relations entre adultes plus harmonieuses. »
Auteur: Corinne Renou-Nativel (NT-F.COM)
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