© Getty Images, Razvan Chisu

Abus financier : l’aide-ménagère avait vidé ses comptes

Une personne vulnérable victime de violence physique, c’est choquant. Mais il existe 
une autre forme de maltraitance des personnes plus âgées, c’est l’abus financier.


Un homme âgé de 88 ans qui employait une aide-ménagère depuis quinze ans a été victime d’un vol de plusieurs dizaines de milliers d’euros. La personne de confiance avait accès à ses comptes pour faire ses courses. Les enfants de cet homme s’en sont aperçus un peu tard. La justice a condamné l’aide-ménagère, mais elle avait dilapidé tout l’argent. Les chroniques judiciaires regorgent de cas plus ou moins similaires. On parle d’abus financier, une forme de maltraitance des personnes vulnérables.

Sous les radars

Selon Infosanté (une collaboration entre le Département de médecine générale de l’université de Liège et le Centre belge pour l’evidence-based medicine), un 70+ sur trois a déjà dénoncé une forme de maltraitance. Il y a la négligence (21 %), la violence psychique (18 %) et puis l’abus financier (8 %). Même son de cloche en Flandre. « Pour vous donner une idée, en 2023, nous avons enregistré 268 cas, constate Lily De Clercq qui travaille pour le Vloco, un centre contre la maltraitance. Mais en réalité, beaucoup de cas restent sous les radars. Car nous sommes un centre de soutien pour les professionnels tels que les aides familiales ou les médecins généralistes, pas pour les particuliers.

« Il est important de souligner que toute forme de violence contre les personnes âgées n’est pas toujours un acte délibéré, ajoute Lily De Clercq. Par exemple, administrer un mauvais médicament n’est pas toujours un acte malveillant. Nous appelons cela une dérive des soins. Mais c’est bien plus rare en cas d’abus financier, même quand il s’agit de prétendument petites choses comme « oublier » de rendre la monnaie.

Et puis, il y a des comportements plus flagrants comme transférer de l’argent sur son propre compte ou exercer une pression pour être inclus dans un testament ou une donation. Le personnel bancaire nous met en garde : il ne faut jamais révéler son code PIN à qui que ce soit, mais dans la pratique, cela se produit bien sûr très souvent. » Des personnes à qui on a tendance à faire confiance figurent ainsi parmi les auteurs d’abus financiers.

La coiffeuse facturait 50 € par repas.

Ne rien dire par « loyauté »

« Il y a toujours une relation de confiance et la personne âgée est en quelque sorte tributaire, ou du moins le croit, poursuit Lily De Clercq. Par exemple, on a connu une dame de 96 ans dont la coiffeuse venait à domicile apporter des repas que la dame pouvait réchauffer. Une aide familiale a constaté que la coiffeuse facturait environ 50 € par repas. Comme la dame ne s’y retrouvait pas entre les francs belges et les euros, elle n’avait pas réalisé que la coiffeuse demandait un prix exorbitant. De plus, elle ne voulait pas compromettre leurs conversations qui lui faisaient tant plaisir. Nos enquêtes confirment que seule la moitié des personnes confrontées à ce problème en parlent. Par peur de représailles, mais aussi par loyauté. »

Sa cliente confondait les francs belges 
et les euros.

Ne pas mettre tout le monde dans le même sac

S’il faut être vigilant, il ne faut pas a contrario suspecter toutes les personnes qui apportent de l’aide. « En effet, précise Lily De Clercq, des professionnels comme des aides familiales nous contactent pour dénoncer des abus. Mais nous ne sommes pas une institution juridique qui enregistre ou traite les plaintes, même si nous prenons note du signalement. Ce que nous faisons, c’est envisager ensemble comment aborder le problème. Il arrive donc qu’une aide familiale qui remarque que quelqu’un dépouille la personne de son argent nous demande : puis-je en parler ? Comment ? Nous lui recommandons alors qu’elle évoque ce qu’elle vu et entendu. Mais aussi d’agir avec prudence et réaliser que la personne âgée peut prendre une décision qui ne sera pas en sa faveur. Si elle choisit elle-même de ne pas confronter celle qui commet probablement un abus financier, c’est son choix. Certaines personnes ont aussi très peur de perdre le contact avec leur soutien et ne sont pas prêtes à renoncer à cette relation en annulant une procuration ou en demandant de leur rendre leur carte bancaire.

Besoin d’aide ?
• En Wallonie : Respectseniors.be au 0800 30 330 ou Senoah.be au 081 22 85 98
• A Bruxelles : Inforhomesasbl.be au 02 223 13 43
• En Flandre : Ouderenmisbehandeling.be, ligne d’assistance au 1712

Que faire alors ?

Il est important d’être présent pour la personne âgée et de continuer à l’informer de la situation. S’il est difficile pour un professionnel d’évoquer un problème d’abus financier, c’est aussi le cas pour la victime elle-même, un membre de la famille, un voisin ou un ami. Et bien sûr, il ne faut pas augmenter le sentiment d’insécurité. Qui se produit surtout en cas de violence physique, moins en cas d’abus financier. Comme vous pourrez le lire ci-contre, il existe en Belgique des lignes d’assistance pour les particuliers.

Ces professionnels écoutent l’appelant (vous pouvez également envoyer un e-mail) et fournissent toutes les informations et les conseils possibles pour agir de la meilleure des manières. Ils évaluent les risques avec l’appelant et discutent des mesures à prendre. ●

Pas d’infirmière dans le dernier testament ?
Les médecins et pharmaciens qui, dans un cadre professionnel, ont pris soin d’un patient en fin de vie, ne peuvent pas être désignés comme bénéficiaires dans son testament ni recevoir de dons.
La loi précise aussi que le personnel des maisons de repos ne peut profiter des dispositions qu’une personne hébergée dans leur établissement aurait faites en leur faveur durant son séjour. La jurisprudence va plus loin en incluant les soins psychologiques ou les actes infirmiers liés à la maladie. Dès que le patient dépend de soins et qu’il y a une relation de pouvoir, l’interdiction s’applique. L’aide ménagère qui n’est pas liée au soin est exclue de l’interdiction.
Les administrateurs nommés par le tribunal ne peuvent pas recevoir de dons ou de legs, sauf s’ils sont des membres de la famille. Et pour ces administrateurs quid des amis ? La Cour constitutionnelle a jugé qu’il ne peut pas y avoir d’interdiction absolue. Il serait excessif qu’un ami ne puisse rien recevoir.

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