La tête du roi Antiochos Ier regarde le soleil se lever chaque matin . © getty images

Au royaume des dieux de l’est de la Turquie

L’ascension du Nemrut Dagi, un mont situé dans l’est de l’Anatolie, au milieu de la chaîne montagneuse du Taurus, relève presque de l’expérience spirituelle. La région autour d’Adiyaman recèle, elle, un patrimoine historique encore plus riche.

Le Nemrut Dagi ou mont Nemrut est l’apogée d’un road trip de trois jours consacré à la visite de différents sites inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. La Turquie en compte 20 parmi lesquels les formations rocheuses de Cappadoce sont probablement les plus connues. Nous mettons le cap plus à l’est et nous nous plongeons dans les civilisations de l’Anatolie orientale, à la frontière entre l’Orient et l’Occident.

La cascade Cirçir d’Elazig

Depuis l’aéroport d’Istanbul, nous prenons un vol intérieur pour Elazig. Premier arrêt: la cascade Cirçir. Pas question de patrimoine millénaire ici puisqu’il s’agit de la plus récente chute d’eau du monde, créée lors de la construction du dernier barrage sur l’Euphrate en 1974. C’est surtout un endroit populaire auprès des habitants d’Elazig qui viennent profiter de la vue et déguster les truites fraîches qui y sont élevées. Dans le grand restaurant, le bouillonnement de la cascade fait office de musique de fond. Outre la truite, une délicieuse soupe aux lentilles figure au menu. La première, mais sûrement pas la dernière, car la soupe aux lentilles est la spécialité locale. Elle est servie dans chaque restaurant, et varie de couleur – lentilles vertes, jaunes, orange – et de consistance.

Après le lunch, nous nous rendons au fort de Harput qui est en réalité plutôt une ville fortifiée qu’un château. Les premières traces d’occupation remontent au VIIIe siècle avant J.-C. La Turquie espère que ce site historique sera un jour reconnu par l’Unesco. Des fouilles sont en cours et des passages secrets ont été découverts. L’un d’entre-eux mènerait à l’église de la Vierge Marie, l’une des plus anciennes églises de Turquie, construite en 179. L’église semble taillée dans les rochers qui entourent Harput. Si vous regardez dans l’autre direction depuis le fort, vous verrez le minaret penché de la mosquée Ulu, ou Grande Mosquée.

Coucher de soleil sur le mont Nemrut Dagi.
Coucher de soleil sur le mont Nemrut Dagi. © National
L'imposant fort de Harput, vieux de 1.800 ans.
L’imposant fort de Harput, vieux de 1.800 ans. © Getty Images/iStockphoto

Tremblements de terre en Turquie et en Syrie

Les tremblements de terre du 6 février 2023 ont durement touché Malatya et Adiyaman. Les sites patrimoniaux d’Arslantepe et de Nemrut Dagi ont été en grande partie épargnés et sont accessibles au public. Vérifiez donc quelles parties de la ville sont sûres et quels musées sont (à nouveau) ouverts.

Les abricots de Malatya

Le 2e jour, nous prenons la direction de Malatya, la capitale de l’abricot. Environ deux tiers des abricots secs proviennent de cette région. Les abricots géants qui ornent les ronds-points de la ville le rappellent. De même que les échoppes qui vendent toutes sortes de spécialités à base d’abricots et le café élaboré à partir de noyaux d’abricots que nous avons goûté – au goût crémeux et acidulé.

Le site historique d’Arslantepe se trouve un peu en dehors de la ville, sur une colline. Il figure au patrimoine mondial depuis 2021, car un des premiers systèmes d’État a été fondé ici il y a sept mille ans. En visiter le site archéologique, on peut apercevoir des fragments de peintures murales, mais pour bien comprendre ce que l’on voit, il est préférable de recourir à un (audio)guide. Selon les archéologues, les nombreux sceaux d’argile trouvés sur le site, qui prouvent que les premiers habitants tenaient déjà une comptabilité complexe, constituent la découverte majeure du lieu. La découverte la plus originale est un ensemble d’épées, peut-être parmi les plus anciennes du monde. Vous pouvez voir ces objets et de nombreux autres artefacts de ce site au musée archéologique de Malatya situé au centre-ville.

Un abricot géant sur un rond-point à Malatya.
Un abricot géant sur un rond-point à Malatya. © National
Un pont romain sur la route de Nemrut.
Un pont romain sur la route de Nemrut. © getty images
Le minaret penché de la mosquée Ulu près du fort de Harput.

Les tombeaux des rois

Le troisième jour est consacré à un long voyage en voiture depuis Adiyaman, à travers la chaîne montagneuse du Taurus, au nord-est du pays. Premier arrêt: Perre, autrefois l’une des plus grandes villes du royaume de Commagène, une civilisation qui vénérait les dieux grecs et perses et qui a été absorbée par l’Empire romain vers 72 après J.-C. C’était une ville animée où les marchands ambulants aimaient venir se reposer pour les sources abondantes qui alimentaient la ville. Mais une véritable ville a également été construite pour les morts, semble-t-il, alors que nous zigzaguons parmi les centaines de cryptes creusées dans la roche. Des restes de mains peintes trônent sur certaines tombes. Je trouve cela charmant jusqu’à ce que le guide m’explique que cela signifie que la personne qui a été enterrée ici a été assassinée.

Les familles royales sont enterrées au sommet des collines et des montagnes du Taurus des kilomètres plus loin. Je m’imagine le dur labeur que cela a dû représenter. Les tombes sont agrémentées de magnifiques colonnes et un énorme tas de pierres les recouvre. Le tumulus du roi Antiochos Ier remporte la palme: sa dernière demeure se trouve au sommet du Nemrut, à quelque 2.200 m d’altitude, avec encore un tumulus de 50 mètres. Mais après avoir parcouru le dernier kilomètre pour atteindre le sommet du mont, vous comprenez pourquoi un roi a voulu être enterré ici. La vue est spectaculaire et le coucher de soleil embrase les montagnes du Taurus de teintes orange, mauves et roses.

Nous marchons jusqu’à la plateforme orientale où des statues géantes, représentant le dieu Zeus et le roi Antiochos regardent le soleil se lever chaque jour. Des tremblements de terre successifs ont séparé les têtes des troncs, donnant à l’ensemble un aspect encore plus étonnant. Sur la terrasse ouest, en compagnie d’une autre rangée de statues géantes, nous observons le splendide coucher de soleil. L’esprit d’Antiochos Ier, fils d’une mère perse et d’un père grec, doit encore hanter les lieux.

Pratique

Y aller: on peut rejoindre Elazig ou d’Adiyaman par un vol intérieur depuis Istanbul.

Quand y aller: le site de Nemrut Dagi se visite d’avril à octobre, on peut explorer le site à sa guise via le village de Karadut. Des visites guidées à la découverte de diverses curiosités le long de la chaîne du Taurus partent d’Adiyaman.

Infos: goturkiye.com

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