Anouk Buelens - Terryn

Toujours en surpoids... Que faire maintenant?

Anouk Buelens - Terryn Dr. Anouk Buelens - Terryn est médecin généraliste en formation et écrit sur la pratique quotidienne

La patiente pince fortement le haut de sa cuisse. Elle voit que je l’observe et s’empresse de me dire « Oui, docteur, je suis grosse. Mais ce n’est pas pour cela que je viens vous voir », commence-t-elle.

Elle se sent épuisée, fatiguée, découragée. Un peu réticente, elle admet qu’elle n’aurait pas dû prendre tant de poids! Et ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé d’en perdre... Son travail est assez physique et elle a consulté plusieurs diététiciens et spécialistes. Elle a finalement eu recours à la chirurgie pour réduire le volume de son estomac. Une opération qui, hélas, n’a eu que peu d’effet. On lui a alors fait un bypass gastrique... qui ne lui a pas davantage permis de perdre le poids espéré. Gros soupir.

Elle me précise qu’elle aurait pu apprendre à vivre avec son sur- poids. Mais elle a d’autres problèmes... Elle présente également un syndrome des ovaires polykystiques qui l’a empêchée d’avoir un enfant. Elle voulait entamer un parcours de fertilité, mais pour cela elle aurait dû perdre 20 kilos. Elle n’y est pas parvenue et son compagnon l’a quittée. Elle a compris que son désir d’enfant avait pris toute la place et aurait voulu donner une seconde chance à son couple... Tout cela la ronge. Elle a aujourd’hui passé 50 ans et a renoncé à avoir un jour un enfant.

Elle s’est mise à boire pour supporter la solitude. Pourtant, on le lui avait formellement déconseillé après son opération de l’estomac car l’alcool monte plus vite à la tête. Mais elle n’a pas voulu l’entendre... Elle trouve au contraire agréable d’être plus vite « pompette ». Ça atténue sa tristesse. De plus, ajoute-t-elle, quand on est gros et qu’on est en compagnie, boire un verre de vin passe plus facilement inaperçu que puiser dans le plat de chips. Elle n’est pas seule dans son cas: les problèmes d’alcool après la pose d’un bypass sont fréquents. Des chiffres récents l’attestent: après ce type d’opération, un patient sur dix devient alcoolique. Et elle n’est pas la seule non plus à souffrir de stigmatisation par rapport à son poids. Le simple fait que je lui dise tout cela semble la rassurer. Que faire maintenant?

Pour commencer, une prise de sang. Car quand on a un bypass gastrique et un problème de dépendance à l’alcool, il est fréquent qu’on soit carencé en vitamines, ce qui pourrait expliquer son état de fatigue et son épuisement. Prend-elle chaque jour les compléments qui lui ont été prescrits après l’opération? Elle me fait signe que non: ils sont bien trop chers et cela fait longtemps qu’elle a cessé de les prendre.

Sans tenir compte d’éventuelles causes physiques, ses symptômes relèvent aussi, selon moi, en grande partie d’un réel mal-être psychologique. Serait-elle prête à suivre quelques séances de psychothérapie... pour ne plus être tentée de noyer son chagrin dans l’alcool? Elle acquiesce. « Je suis avant tout grosse dans ma tête, et je ne veux plus que l’alcool soit une fuite. »

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