Anne Vanderdonckt

Des pensions aux frais de la princesse?

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

Lu dans la presse qui relate une étude récente de l’OCDE. «La dépendance des personnes âgées à l’égard des pensions légales n’est nulle part aussi élevée qu’en Belgique. Plus de 85% du revenu brut moyen des personnes âgées de plus de 65 ans provient de fonds publics.»

«Dépendance». «Revenus qui proviennent de fonds publics». Même si ce n’est pas cela qu’on dit, c’est cela qu’on comprend: les pensionnés (une fois encore ces horribles baby-boomers) ont chanté tout l’été de leur jeunesse pour, la bise venue, venir sucer les fonds publics afin d’assurer leurs vieux jours. Aux frais de la princesse ou plus précisément de tous ceux qui cotisent et cotiseront. Des profiteurs, quoi, ces pensionnés!

C’est rageant, car c’est oublier que toute leur vie professionnelle, ils ont cotisé eux aussi, ces retraités. Pas pour leur propre pension, puisque le système belge est bâti de telle manière que les actifs actuels cotisent pour les retraités actuels. Mais il n’empêche qu’ils ont alimenté, pour beaucoup, durant un nombre d’années dépassant celui de leur espérance de vie après la retraite, les caisses de l’Etat. Alors laisser entendre sans cesse qu’ils pèsent est d’autant plus dur à avaler que l’évolution de la pyramide des âges est connue depuis longtemps. Au point d’ailleurs que fut créé, en 2001 par Johan Vande Lanotte, alors ministre du gouvernement Verhofstadt, un «fond argenté», sorte de cochon-épargne virtuel de l’Etat destiné à financer l’augmentation des coûts des pensions liée à l’arrivée à la retraite des baby-boomers quelques années plus tard. Pour rappel, ce fonds argenté était alimenté par des recettes exceptionnelles et les surplus budgétaires. Cela a fonctionné jusqu’en 2006. Puis, faute de surplus, fin a été mise à l’aventure en 2016, le fonds coûtant plus qu’il ne rapportait.

Toute leur vie professionnelle, les retraités d’aujourd’hui, ont cotisé pour les retraités de l’époque.

Imprévoyants? Le futur était pourtant si facile à anticiper que, lorsque j’ai commencé à travailler, au début des années 80, mon père m’a accompagnée à la banque pour souscrire à une épargne-pension, en précisant que, quels que soient les aléas professionnels que je pourrais rencontrer au cours de ma carrière, et il y en a eu, il était exclu d’arrêter ces versements mensuels. «Parce qu’on ne sait pas si, plus tard, les pensions seront toujours payées». A l’époque déjà, c’était un souci. Et à l’époque déjà, on ajoutait: «Et s’il faut aller un jour en maison de repos, il faut pouvoir la payer et cela coûte une fortune».

Mais l’épargne pour sa pension peut revêtir de multiples formes que l’étude de l’OCDE, ou ceux qui l’ont reprise, passent sous silence (lire notre dossier). L’immobilier, par exemple. Lorsque j’entends aujourd’hui dire à la radio par des spécialistes que les jeunes ont de plus en plus de mal à acheter leur logement, mais qu’il y a tout à fait moyen de se passer de ce fil à la patte, help! Un logement, c’est clairement une sécurité pour ne pas dépendre des hausses de loyers ou des déménagements dictés par un propriétaire. Pour beaucoup, un bien propre fonctionne comme un rempart contre la précarité… et permet par la même occasion de ne pas devoir recourir à des fonds publics.

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